Lettre n°16 (2010)

Editorial du rédacteur en chef de la revue Sciences sociales et sport

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La revue Sciences sociales et Sport compte deux numéros parus en septembre 2008 et septembre 2009, un rythme de publication plus lent que prévu, puisque le projet était de deux numéros par an. Ces deux livraisons ont permis la publication de 12 articles, et de 4 compte-rendus de travaux scientifiques. Au rythme actuel des arrivées de nouveaux articles à la rédaction, les livraisons ne peuvent pas être plus fréquentes.
Jetons un regard sur la situation, pour appréhender les causes de cette attraction insuffisante, puis envisager des solutions nouvelles.
La rédaction a reçu à ce jour 60 manuscrits d’articles :
– 12 ont été acceptés et sont parus (n° 1 et n° 2 de la revue)
– 3 sont acceptés et à paraître :
– 11 sont en cours d’expertise :
– 34 ont été refusés ou ont donné lieu à abandon
Si l’on écarte les articles en cours d’évaluation (n = 11), il reste 49 soumissions d’articles avec 15 acceptations et 34 refus : soit à peu près 30% d’articles acceptés. Cette politique sévère a des effets dissuasifs sur les auteurs, effet négatif qui se combine avec une certaine lenteur des expertises (variable selon les cas). Nous essayons d’améliorer les performances du système, mais il reste toujours difficile pour une revue de trouver les experts les plus pertinents pour un sujet donné, et d’obtenir leur évaluation rapide et bénévole, alors qu’ils sont pris par de multiples charges professionnelles.
Un autre facteur pèse sur l’activité de la revue : la reconnaissance de son statut de revue scientifique par les instances d’évaluation de la recherche.
Avec l’organisation actuelle, deux instances nationales sont chargées d’évaluer l’activité de recherche au sein de l’Université, où se préparent les thèses et où exercent les enseignants-chercheurs : l’Agence pour l’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur (AERES), qui juge l’activité des Laboratoires (ainsi que les Universités, et les maquettes d’enseignement), et le Conseil National des Universités (CNU), qui évalue l’activité individuelle des chercheurs et régule les carrières. Ces deux instances, distinctes, mais liées puisqu’elle abordent les mêmes réalités aux plans collectif et individuel, ont entrepris d’établir des listes de revues « reconnues » comme ayant un bon niveau scientifique. Tout l’enjeu, pour Sciences sociales et sport, est d’y figurer, de préférence en bonne place. Ainsi, les chercheurs auront un intérêt à venir publier chez nous. Mais, cette reconnaissance n’est pas encore acquise.
Le CNU, la plus ancienne instance d’évaluation, comprenant des membres élus (les deux tiers de son effectif), a depuis longtemps établi une liste des revues reconnues, avec une hiérarchie de valeur, sans que celle-ci soit formellement écrite : la hiérarchisation, en sciences sociales au sein de la section STAPS du CNU (74°section), tient compte du fait que la publication a un Comité d’experts scientifiques, qu’elle est internationale ou nationale, qu’elle publie des textes de recherche avec les éléments identifiables d’une enquête, d’une connaissance de la littérature scientifique, etc. Mais, la hiérarchie n’est pas totalement fixe : lorsque l’évaluation d’un dossier de chercheur est poussée jusqu’à un examen « qualitatif » de ses écrits, il arrive qu’un article « très bon » publié dans une revue « moyenne » soit davantage pris en compte qu’un article « moyen » dans une revue mieux cotée. Bref, le CNU conserve une fonction d’évaluation qui n’est pas entièrement inscrite dans une liste hiérarchisée de revues.
Mais, avec la mise en place de l’AERES en 2007, nous voyons apparaître des listes écrites de revues accréditées. Pour les STAPS, plusieurs versions sont parues depuis deux ans : d’abord une liste avec trois catégories, les meilleures revues cotées en A, les moins en C. Puis une liste qui ne conserve que les meilleures, en distinguant les A+ et les A : puis, une dernière qui ne comprend que des A (mais avec 3 subdivisions). Les dernières versions ne conservant que le « dessus du panier », de multiples revues se retrouvent « non citées », ne sachant pas si elles relèvent d’un rang inférieur, ou si elles ne comptent plus du tout comme revues scientifiques : ou encore, si elles sont en attente d’être reconnues parce qu’elles sont récentes (revues « émergentes », comme la nôtre). La décision récente de l’AERES, décembre 2009, de ne qualifier, c’est-à-dire inclure dans ses listes, aucune revue de recherche issue du secteur des STAPS et publiant des articles de sciences sociales (Sciences & Motricité et STAPS qui publient dans toutes les disciplines de ce secteur inter-disciplinaire : Revue Européenne de Management du Sport : etc.), d’ignorer Sciences sociales et Sports, rend encore plus incertaine la motivation des auteurs à soumettre des articles à une revue difficile, tant qu’elle n’est pas répertoriée.
Mais, il faut savoir que cette liste de l’AERES a encore changé dernièrement, et qu’elle est susceptible de révisions périodiques. Le CNU (STAPS), de son côté, tente de répertorier d’autres catégories de revues que les revues d’excellence ou de renommée internationale (les revues A) : il élabore une liste de revues classées B, sur laquelle il serait utile de figurer en tant que revue « émergente ». C’est sous la pression que le CNU est aujourd’hui en cours de réflexion pour établir sa liste de revues accréditées.
Une troisième condition pèse sur la dynamique actuelle de la revue. Etant récente, n’étant pas encore bien diffusée, elle n’est pas matériellement « présente » auprès des auteurs comme le sont des revues plus anciennes et auxquelles les Laboratoires sont abonnés. On ne fait que commencer à en parler, à la citer : elle est « émergente ». Comment comprendre autrement le fait que, durant l’année 2009, la revue n’a reçu que onze manuscrits ?
Pour franchir ce moment de tension et d’incertitude, nous entreprenons de lancer une campagne pour faire connaître et lire la revue, et pour multiplier les contributions. Le CA de la 3S, le Comité de rédaction de la revue réfléchissent sur la question. Les historiens de la Société Française d’Histoire du Sport nous appuient. La revue a besoin d’auteurs, de lecteurs et d’experts qui évaluent, en toute rigueur scientifique, les productions de notre secteur de recherche. Ils sont là, nous les trouverons avec votre concours. Les ambitions qui ont fait renaître les Sociétés savantes de Sociologie et d’Histoire des sports au début des années 2000 sont toujours vives.
Jacques Defrance – Rédacteur en chef, Sciences sociales et Sport
Centre de Recherches sur le Sport et le Mouvement (EA 2931)
Université de Paris-Ouest Nanterre.

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